les aventures de Sylvestre ! (5° épisode)
La révélation de Sylvestre.
Caliméro et moi avions vite pris le pli : s’écrire en cours plutôt que de bavarder, sur des post-it pour un maximum de discrétion, mais aussi tous les jours, le soir en rentrant chacune chez soi. Nous nous y racontions notre vie quotidienne à la maison, en plus de considérations toutes lycéennes sur nos profs et nos camarades.
Tant que nous étions au lycée, ça a été aisé. Au bout d’un moment, nous relevions le défi d’écrire des lettres de plus en plus longues. Nous utilisions pour cela du papier à lettres format A5, et avec nos grosses écritures (surtout la mienne), nous avons même fini par dépasser les vingt pages. Caliméro comme moi pouvions être très inspirées… Surtout si en plus, en philo, certain de nos amis nous séparait l’une de l’autre. Caliméro était embêtée, moi aussi, et ça s’est ressenti en cours comme par courrier. A vrai dire, je dois reconnaitre n’avoir pas fait d’étincelles en philo… Caliméro, en revanche, était dans les petits papiers du prof, même s’il la virait de temps en temps…
Arrivées à l’université, ce fut différent. Nous nous voyions nettement moins, d’autant que nous n’avons pas fait les mêmes études. Mais le courrier marchait bien, dans un sens comme dans l’autre. Et puis il y a eu la séparation géographique : lors de ma 2° année de DEUG, ma famille a quitté Metz pour Lille. Le courrier a donc suivi, les lettres étaient toujours longues. Caliméro et moi avions toujours des choses à nous raconter. Personnellement, j’ai commencé à devenir un peu zinzin, au-dessus du lieu de travail de mes deux parents. Ecrire à ma copine m’a fait du bien dans le sens où je pouvais partager, mais aussi, j’y ai exorcisé ma situation par l’humour. Et j’ai commencé à de plus en plus innover dans mon courrier. J’y racontais à ma manière les aventures de Sylvestre (faisant du théâtre par exemple), et cela m’amusait beaucoup.
L’un des lieux de vacances de ma famille dans les Landes, Mugron, a ainsi été renommé : une fois, en attendant les examens (ou les résultats ?), Mugron était devenu une île (alors que c’est la cambrousse !), et je me prenais à la fois pour Jules Verne, sur mon Nautilus, et pour Charles Perrault. Je me souviens d’un « je ne vois que l’herbe qui verdoie, et les examens qui merdoient »… Puis, peu à peu, je me suis détachée de mes influences, sans renier mon goût pour Tintin, car dans mon courrier, je pouvais aussi devenir chevalier de Hadoque : mon vélo devenait mon cheval, le « tenorino aveugle » qui me charmait à l’époque, Andrea Bocelli, chantait à Moulinsart… Et je crois que Caliméro riait bien. Etait-elle dupe de mon état réel ? Je ne sais pas. En tout cas, elle trouvait cela cool, et puis, dans mon courrier, il y avait quelques bonus… mais chut, j’en parlerai une prochaine fois !